jeudi 30 septembre 2010

L'Élan littéraire. Liège. 1885-1886



Albert Mockel (1866-1945) en 1885 fonde un cercle littéraire à l'Université de Liège et son bulletin, L'Élan littéraire. En juin 1886, il transforme l'Élan pour en faire La Wallonie. Mockel mettra en scène, dans son premier livre, Les Fumistes Wallons (1887), les membres du groupe de L'Élan littéraire cachés derrière des pseudonymes transparent.

L'Élan,

puis L'Élan littéraire.

Revue mensuelle.

Liège.

Février 1885 – Mai 1886

Le numéro 1 porte : Revue du cercle littéraire L'Élan.

Albert Mockel : Si tu voulais ! A. Thos : Pour un mot, Nouvelle (Moeurs parisiennes). Albert Mockel : Ma Voisine. Aug. Jottrand : Paysages. Ch. Van Halmé : Un peu de morale empirique. Albert Mockel : L'Hiver mondain de Georges Rodenbach, résumé de la Conférence du 27 janvier. C. Van Halmé : La codification des lois civiles françaises, résumé de la Conférence du 20 janvier 1885. Léon Gheur : Les Tremblements de terre, résumé de la Conférence du 6 janvier 1885.

Albert Lomeck [Mockel] : J'aime la danse. Ch. Van Halmé : Le Danger d'être trop belle. A. Ramis : Sonnet entomologique. R. Ellum : Souvenir. Albert Mockel (à la table l'article est signé L. Hemma, comme l'article suivant de la même série) : Profils universitaires, G. Odailleur. E. Destexhe : Danton, résumé de la Conférence du 20 février.

Charles Van Halmé : Comment on rend les hommes vertueux. F. Rheb : Régates. Albert Mockel : Grisailles. M. M. : Lutte. Hemma : Plein été. M. M. : Ballade. G. Balsamo : La Souffrance, fragment, extrait d'une Conférence sur la poésie et ses sources, donnée le 26 mars 1885. G. Balsamo : La Fleur, à Miss M. A. Thos : Un 1er Avril (A suivre). Diavolo : Le Mouvement Flamand.

Ch. Mettange : Désillusion. Gustave Rapière : Une Vie d'étudiant (1) (Emile Charlier). A. Ramis : Paradoxe ? Albert Mockel : Funérailles. Ardel Raman : Hallucinations ! Diavolo : Le Mouvement Flamand (suite à l'article paru dans la revue précédente).

L'Elan littéraire : Hommage à Charles Rogier et Victor Hugo. Georges Deconinck : Victor Hugo. Fritz : Sur la glace, à mes patineuses. M. M. : Simple boutade. Gaston Vyttall : Le Suicide. Hemma : ? Impressions d'un Sage grec en rupture de bonheur. Diavolo : Edmond About. Fritz : Barcarolle. Charles-Edouard : Croquis maritime. Diavolo : Le Mouvement Flamand (suite à l'article paru dans la revue précédente).

Alexandre Macédonski : Le Vaisseau fantôme. A. Thos : La Souffrance est un plaisir, monologue. Tocagno : Oubli. Albert Mockel : Amour platonique. A. Thos : Rire forcé. L. Hemma : Profils universitaires II, T. Ravailleur (Fragment). Fritz : Viens ! Chanson à Mignonne. A. M. : Ronsard et les classiques. De la Fère : Sérénade.

Nestor : Sujet historique. Alexandre Macédonski : La Valse des Eglantines. Hector Chainaye : Lydia. Fritz : Le Rouet. Albert Mockel : Nerveux ! (A suivre). Fritz : Marquise Pompadour (en style Louis XV).

Charles Edouard : Tristia. T. Réville : Mimi. L. Hemma : En Villégiature. Saynette. De Khermantini : Le Lac. Gustave D. : En correctionnelle. De Khermantini : Coquetterie. Diavolo : Denise.

Fritz : Chanson d'autrefois. Gaston Vyttall : Nouvelle. T. Réville : Jouons à la raquette ! Albert Mockel : Nerveux ! (A suivre).

Charles Edouard : Soir d'Automne. F. B. : Idylle. Gustave Rapière : Ein Fest-Commers (A continuer). Gaston Vyttall : Nouvelle (à suivre). Albert Mockel : Nerveux ! (A suivre). XXX. : De l'Art, un aperçu sur l'Art aux trois derniers siècles.

T. Réville : Mimi (A suivre). Hector Chainaye : Premier amour, conte mignon. Albert Mockel : Nerveux ! (A suivre). Fritz Ell : Prend garde ! Gustave Rapière : Ein Fest-Commers (Extraits de Miss Dispute, roman de moeurs universitaires (en préparation) (A continuer). Gaston Vyttall : Nouvelle (Fin).

1886.

XXX. : De l'Art (A suivre). Hernan : Sonnet des Muguets. Sonnet à un coeur espiègle. Léon Morel : Critique littéraire. De l'Amour chez les Classiques et les Romantiques, dans la poésie dramatique (A continuer). Hernan : Dalila. Albert Mockel : Nerveux ! (Fin). Armand Hanotieau : Hiver. T. Réville : Mimi (Fin).

Fernand Séverin : Poème Batbare. Léon Morel : Critique littéraire. De l'Amour chez les Classiques et les Romantiques, dans la poésie dramatique (A suivre). G. Girran : Si tu savais ! Hector Chainaye : Nuit nerveuse. Maurice Siville : Poème en prose, amour défunt. Wladimir A. Macedonsky : Conte oriental. Fritz Ell : Bluette. Arabesque. Morico : Déclaration rentrée. Abel Moran : L'Essor, Bruxelles, 18 janvier 1886. R. Ellum : Chronique musicale. A. M. : Le Concert du Conservatoire. Diavolo : L'Etudiant pauvre de Millocker. Chronique littéraire : Albert Mockel : Conférence de Rodenbach, Les Concubins de Camille Lemonnier. L. H. : Le Roitelet. G. V. : Par les champs et par les grèves de Gustave Flaubert. M. S. : L'Almanach de l'Université de Liège. Nécrologie.

G. Girran : Le Temps des Chèvrefeuilles. Albert Mockel : Pauvre Bébé, conte blanc. Léon Morel : Critique littéraire. De l'Amour chez les Classiques et les Romantiques, dans la poésie dramatique (A suivre). Fernand Severin : Sicut Deux. In Exelcis. Maurice Siville : Glissez Mortels !... (fragment). Chronique Artistique : L. Hemma : Le Salon des XX. Chronique musicale : L. H. Lakmé opéra-comique de Léo Delibes. Chronique Littéraire : Albert Mockel : La Morte par Octave Feuillet, La Jeune Belgique au théâtre. Nécrologie.

Maurice Siville : Epousailles. Auguste Vierset : Pantoum. Fernand Séverin : Genest. Fritz Ell : Croquis musicaux. Fernand Séverin : Renoncement – Nuit de mai. Armant Julin : Agonie lente. Albert Mockel : Happe-Chair (de Camille Lemonnier). Chronique Musicale : Alb. M. : Le Concert du Conservatoire. Y. Z. : Le Concert Litz. L. H. : Mademoiselle Weber. Chronique littéraire : F. S. : Curieuse ! (de J. Péladan). M. S. : Un Crime d'amour. G. R. : Almanach de l'Université de Gand. M. S. : Poésies diverses.

Gustave Rahlenbeck (précédemment, Gustave Rapières): Jules Dereul (extrait de Miss Dispute, roman de moeurs universitaires, en préparation). Albert Mockel : Les Voix. Maurice Siville : ???. Fritz Ell : Croquis musicaux. P.-M. Olin : Bernal Diaz Del Castillo, conquitador. Histoire de la Conquête de la Nouvelle-Espagne. F. Séverin : Dans les bruyères. Léon Morel : Critique littéraire. De l'Amour chez les Classiques et les Romantiques, dans la poésie dramatique (Suite et fin). Chronique Musicale : L. Hemma. B. B. : Cercle musical des amateurs. Chronique Littéraire : S. : L'Oeuvre par Emile Zola. M. S. : Final d'amour (Pierre Poirier). Annonces pour la Revue de Demain et La Pléiade.




Bibliographies de revues dans Livrenblog :

Revue L'Image, bibliographie complète et illustrée.
Bibliographie de la revue Le Beffroi (1ère partie), (2e partie), (3e partie), (4e partie).
Bibliographie illustrée et complète du journal Le Pierrot (1ère partie), (2e partie), (3e partie), (4e partie).
La revue Palladienne de 1 à 10
.
Les Contemporains A. Le Petit F. Champsaur.
La Revue des Lettres et des Arts 1867-1868.
La revue Matines. 1897-1898.
Le Bambou, Bibliographie illustrée.

Le Carillon.
1893-1894
La Revue d'Art. 1896-1897.
Les Gerbes. Revue littéraire bimensuelle. 1905 - 1906.
Le Feu, Marseille, 1905-1906.

La Rose Rouge, 1919. Cendrars, Salmon, Carco.
La Revue Contemporaine, Lille. 1900 - 1902
Le Thyrse. 1897.
La Cité d'Art et L'Art et l'Action. 1898 - 1899.
L'Idée Moderne 1894-1895.

Le Nouvel Echo 1892-1894.
La Poésie Moderne, 1882.

La Pléiade. 1886 et 1889.
La Basoche 1884-1886.
L'Aube Méridionale 1898-1899.
L'Effort Libre, 14 numéros, 1911-1914.

lundi 27 septembre 2010

Léopold Dauphin, Mallarmé, Madeleine Legrand, dans L'Aube Méridionale.


Léopold Dauphin,

Stéphane Mallarmé,

Madeleine Legrand,

dans L'Aube Méridionale.

Dans le numéro 7 et 8 d'octobre 1898, encadré de noir paraît en tête de L'Aube Méridionale ce poème d'hommage à Mallarmé, mort le 9 septembre 1898, par Léopold Dauphin, il est suivi de Sur la Berge un poème sur l'enterrement du maître.


A Stéphane Mallarmé

10 septembre 1898

Musiques ombreuses vertes
Pour imiter les fontaines
Que tes flûtes si lointaines
Par leurs trous au soir ouvertes

Ou quel allegro touchant
Tes blés dorent maints et blonds
Clairs trilles de violons
Quand exulte le couchant

Mais sur les toits des fumées
Les fiancent à l'étoile
S'arpégeant avec le voile
Long de harpes embrumées.
Pleurs... le Rêve en ses décors
Clame une plainte de cors.

Léopold Dauphin.


11 septembre 1898
Enterrement de Stéphane Mallarmé

Sur la Berge

de Bichenic à Samoreau

______________

Fiers de vivre éperdus pour un art qu'on insulte.
Th. de Banville.

... la Mort, planant comme un soleil nouveau,
Fera s'épanouir les fleurs de leur cerveau.
Ch. Baudelaire.


Fastueuse fanfare ainsi qui veut te suivre
De crêpe noir voilée aujourd'hui, las ! Pour toi
Tout l'or sonore éclate au pavillon des cuivres.

S'il clame en notre deuil le long de ton Convoi
La tristesse éperdue, il rythme – non funèbre,
Une idéale Marche en avant vers ta Foi !

Cependant que descend ta Voix dans les Ténèbres
Pour les charmer ainsi qu'elle fit de l'Azur,
C'est, en larmes, le Rêve ici qui se célèbre,

Et la Lumière vient éclairant ce qu'obscur
Un mol entendement croyait être, et s'incline
L'Idée au vaste front devant ton Art si pur.

Cantique de Beauté ! Ce jet d'eau cristalline,
Liquide et noble lis, il surgit d'un Amour
Comme s'il nous montrait telle route divine

Où, mieux sereine, l'Ame ira son vol moins lourd.

***

........... fleur suprême de l'homme,
Franchement, largement, simplement, l'Amitié.
P. Verlaine.

« Parfumez l'âme de notre frère !
Aimez-la, fleurissez pour lui, roses du ciel ! »
Th. de Banville.



Mais, exhalant aussi leur plainte douloureuse,
Défaillent de tendresse à l'entour du cercueil
Et les hautbois plaintifs et la flûte pleureuse :

Ils pleurent l'Amitié dont ils eurent l'orgueil
Et qui nous valut tant de calmes douces heures
Alors qu'avait souri ton geste de l'accueil !

Ils pleurent et la Grâce et la Sagesse ! Ils pleurent
La Rêverie au fond de tes yeux comme un ciel,
Et, rayonnant : ton Charme ; et ta Voix : la meilleure !

Sanglots mélodieux, ils pleurent le bon miel
Parfumé de ta lèvre et toute son ivresse
Où nos pensers flottaient jaloux de l'Irréel !

Jusqu'au glas des voisins paysans qui ne cesse
De tinter à nos cœurs leur douleur, leur regret,
En cette pastorale émue : ô sa tristesse !...

Ton fleuve éploré coule et gémit ta Forêt.

Léopold Dauphin.

Léopold Dauphin (1848-1925), musicien et poète, il est l'auteur d'opérettes, d'une anthologie des maîtres de la musique... Ses poèmes, publiés dans le Chat Noir seront repris en volume dans, Raisins bleux et gris, avec un avant-dire par Stéphane Mallarmé (Vanier, 1897) (1). André Chevrier, dans son article Le sonnet anglais chez Mallarmé, consacre un chapitre à ce disciple de Mallarmé, amateur de « quatorzain » (2)
Il est le beaux-père du poète amorphe et librettiste, Franc-Nohain et se trouve ainsi être le grand-père du parolier et animateur Jean Nohain et de l'acteur Claude Dauphin.
Sous le pseudonyme de Pimpinelli il collabore au Chat Noir et au Pierrot d'Adolphe Willette.

(1) Ses autres volumes de poèmes : Couleur du temps (Vanier, 1899), Pipe au bec suivi de Les Fontaines du Bois-Joli (Vanier, 1900).
(2) Chevrier Alain. Le sonnet anglais chez Mallarmé. In: Romantisme, 1995, n°87. Fins de siècle. pp. 29-53. Revue Persée.



Echos du N° 13 du 25 mars 1899 de L'Aube Méridionale :

« Le 8 mars, a été célébré, à Paris, le mariage de M. Maurice Legrand, plus connu dans le monde des lettres sous le pseudonyme de Franc-Nohain, et de Mlle Madeleine Dauphin, notre charmante collaboratrice. La rédaction de l'Aube Méridionale, est heureuse d'offrir aux nouveaux époux tout ses meilleurs vœux. »


Illustration de Madeleine Dauphin (future Mme Franc-Nohain)
L'Aube Méridionale, N° 10 et 11, décembre 1898, janvier 1899


Marie-Madeleine Dauphin (Béziers 1879 - 1942), fille de Léopold Dauphin et future épouse Legrand (Franc-Nohain), était dessinatrice, l'Aube Méridionale publia l'une de ses illustrations, en hors texte, dans son numéro 10 et 11, décembre 98 janvier 1899. Elle se fera connaître par ses dessins et aquarelles, sous le nom de Mme Franc-Nohain.
Elle illustrera de nombreux livres pour la jeunesse : Le Bon Dieu et les enfants de Francis Jammes, Les Contes de Ma Grand-Mère de Amélie Charles Duval, Le Journal de Bébé tenu par Maman, Chantons et Dansons d'Ernest Van de Velde, Histoires enfantines... ainsi que la série des Jaboune avec Franc-Nohain (histoires inspirées par leur fils Jean, qui gardera le pseudonyme de Jaboune pour ses émission radiophoniques pour enfants). Pierre Bonnard fera sont portrait.

Franc-Nohain dans Livrenblog : "Vive la France !" le Théâtre des Pantins censuré. Une lettre de Franc-Nohain.

L'Aube Méridionale. Pimpinelli dans Le Pierrot (2e, 3e et 4e parties).

Mallarmé dans Livrenblog : La Dernière Mode de Mallarmé. Mauclair, Mallarmé et les Ballets Russes. Souvenirs sur Mallarmé par Victor Margueritte. Mallarmé : Autobiographie, lettre à Verlaine. Dr Ed. Bonniot : Notes sur les Mardis.


jeudi 23 septembre 2010

Georges Darien dans l'Almanach des Lettres françaises et étrangères



Georges Darien, lettres de Londres


On pouvait lire dans "Almanach des Lettres françaises et étrangères" des vendredi 25 avril et samedi 26 avril 1924, cet article, non signé, sur Georges Darien qui vaut surtout par les lettres qui s'y trouvent citées.


Un méconnu : Georges Darien

Romancier, journaliste, auteur dramatique, sociologue de l'impôt unique, théoricien de la nationalisation du sol ou militant de la C. G. T. (car il constitua, vers 1910, le syndicat des auteurs et des acteurs), Georges Darien eut vers le début du siècle une bien curieuse figure qu'évoqua M. L. Emile Janvion dans l'Éclair.

Superbe type de révolté et de raté ! Mais de raté magnifique, de raté volontaire au sujet duquel Clémenceau à écrit dans "Les plus forts" cette vérité douloureuse: "Le raté ! Avec les vies manquées se fait dans la douleur le génie de l'humanité vivante !"

...Lors de la fondation de l'Ennemi du peuple (1904), écrit M. Janvion, sur la suggestion de Zo d' Axa, j'invitais Darien, alors en Angleterre, à collaborer. Il s'était exilé à Londres, vers les débuts de l'affaire Dreyfus. Pourquoi cet exil ? Mystère que je n' ai jamais cherché à approfondir ; pas plus que je ne cherchai, un an plus tard, à lui faire expliquer les vraies raison qui lui firent, par les supplications les plus pressantes, me demander les moyens de son rapatriement (février 1905).

L'Ennemi du peuple fut le journal des organisateurs du fameux congrès antimilitariste d'Amsterdam (juillet 1904). Darien arriva, de Londres, dans le capitale hollandaise. On devine la mine effarée des bons pasteurs hollandais et du brave Domela Nieuwenhuis, lorsque l'auteur de Biribi se prît à tonitruer à le tribune contre les "Judas du pacifisme". - Quel drôle d'antimilitarisme importez-vous là ? soupirait Domela. "Je suis antimilitariste, tonnait Darien, mais je ne suis pas antimilitaire. Il n'y a rien à faire internationalement... Il faut agir nationalement, patriotiquement, vous m'entendez..." Tous les délégués en étaient chavirés...

Rentré à Londres, il envoya a M. Janvion ses impressions dans une volumineuse correspondance. Il fulmine contre "les fendeurs de poils et les épuceurs d'acarus" qui ont sévi à se congrès. Voici une curieuse lettre datée de novembre 1903 (nous sommes sous le ministère Combes), dans laquelle il donne son opinion sur l'organisation de l'Internationale par comités nationaux et sa petite profession de foi.

14 Well Walk Hampstead,

Nov. 15 1904.

...Pour l'organisation en France, le caractère sectaire s'impose. On ne peut songer à tolérer, dans le comité français, des gens qui ont des attaches - et surtout des attaches d'intérêt - avec les gredins au pouvoir. Sous un régime républicain, comme le régime républicain actuel, les gens au pouvoir sont toujours l'ennemi. Dire qu'il faut défendre la république est risible. Quelle est la différence entre l'état républicain français par exemple, et l'état monarchique anglais ? Celle-ci: qu'en Angleterre la monarchie (et les institutions qu'elle comporte) forme un tampon entre les possédants et les déshérités. En France le tampon n'existe pas. Ce sont les possédants qui sont sur le trône, crient vive la république !

Et lorsque les déshérités, au lieu d' attaquer les riches, dont rien ne les sépare, parlent de sauver la république, ce sont les derniers ânes et des lâches. "Faut-il faire de la politique ?" demandent les anarchistes ? Quelles brutes ! Mais en crevant d'inaction et de sottise sur votre paillasse antithétique Liberté-Autorité, vous faites de la politique imbéciles ! Les anarchistes ! Que dire de ces vaniteux imbéciles ? Le mépris s'applique à eux comme le cataplasme à un abcès. Je n'ai cure de cette poignée d' idiots...

...Inutiles de vous dire que je ne me donne ni comme socialiste ni comme anarchiste, je n'ai rien à faire avec ces vieilleries. Je suis simplement un homme révolté par l'horreur de la situation générale et, n'étant ni assez fort ni assez intelligent ni assez savant pour me conduire en citoyen du monde, je désire me révolter simplement comme Français. J'espère être entendu et compris par un grand nombre des gens honnêtes. Qu'ils soient les bienvenus de quel côté qu'ils viennent et tant pis si nous perdons la clientèle d' imbécile, graissés de la couenne d' une philosophie qu'ils appellent socialiste ou anarchiste et dont ils ignorent le sens et l'origine...

A côté du militant d'ailleurs, coexistait un écrivain rare, et qui ne restait jamais un jour sans écrire sa ligne...

Cet écrivain si vigoureux, - trop vigoureux - ne trouvait, bien entendu, pas d'éditeur. En octobre 1904, par exemple, il avait terminé son dernier livre, l'Epaulette. Il envoie alors de Londres le manuscrit à son ami Janvier et lui écrit (lettre inédite, et d' autant plus curieuse que vingt ans à l'avance, Georges Darien y offre déjà la palme réparatrice à l'écrivain que le jury de l'Éclair vient de couronner comme le premier des romanciers boycottés, à Henry Fèvre) (...)

Écoutons-le:

...Quand à l'Épaulette je vous remercie vivement de ce que vous voulez bien faire. Vous pouvez dire à l'éditeur (ce que j' avais déjà dit au voleur S...) que je viendrais faire des conférences en France, s'il le désire, pour pousser le livre. Vous savez quelles seront les idées que j'exposerais. - Il n'y a pas de "violences" dans ce livre. La seule raison pour laquelle il n'a pas été édité, c'est qu'il n'est pas Dreyfusard. J'aurais beaucoup à dire là dessus un jour ; mais c'est inutile aujourd'hui. C'est un livre antibourgeois, mais pas antimilitaire. Je ne suis pas antimilitariste (considérant le militarisme, comme je l' ai expliqué dans l'Ennemi du peuple, comme une religion) ; mais je ne suis pas antimilitaire.

Je crois encore devoir dire ceci, pour faciliter les choses. Lorsque j' ai écrit le voleur, j'avais fait un plan d' une série de romans dont je voulais faire une sorte de Comédie Humaine.
Le premier était le Voleur, le second l'Épaulette, le troisième le marchand de viande (les femmes), le quatrième la Maison du mouchard (inutile de vous donner la suite). Les même personnages reviennent (mêlés à d'autres) dans tous ces romans. (En somme, c'est le système de Balzac ; mais les préoccupations sont différentes.) Le premier volume édité (je vous dirais comment il le fut, après mon refus au juif B. Lazare de l'épauler, de fortifier un roman sur son "Dreyfus"...) Le second est écrit, les deux suivants sont fortement préparés, écrits en partie. Je crois qu'il suffirait de me lancer pour avoir un succès. Il est aussi probable que ma collaboration à l'Ennemi du peuple a dû augmenter le public qui s'intéresse à mes oeuvres. Naturellement, si je trouve un bon éditeur français décidé à se comporter convenablement, je suis tout disposé à lui donner la série de romans dont je vous expose le commencement. Vous pouvez dire aussi, en cas de besoin, que tolérablement connu ici ; en dehors de ce que j'écris dans la presse, j'ai publié un roman (anglais), il y a cinq mois, etc...
La partie de l'Épaulette, qui est consacrée à le bataille de la bérézina, est adaptée des documents allemands publiés par le major von Lindenau. Vous pouvez dire aussi que je pourrais assez facilement faire publier de suite une traduction en allemand ; en anglais aussi sans doute.
...La seule raison, je crois, pour laquelle on me boycotte est (en laissant les haines de rancunes dreyfusardes) que mes livres contiennent de l'énergie. C'est monstrueux.


Documents fournis par Vincent Maisonobe.



Georges Rodenbach par Jean de La Hire. 1899.


En févier 1899, dans sa revue L'Aube Méridionale, Adolphe d'Espie, signe pour la première fois de son nouveau pseudonyme de Jean de La Hire, un article en hommage à Georges Rodenbach, mort le 25 décembre 1898. Depuis juin 1898, Jean de La Hire vit à Paris et fréquente les Dimanches de Rodenbach.


Georges Rodenbach


Je ne parlerai donc, ici, que des morts ! Le mois dernier, je déplorais la perte de Jean de Tinan, je dois regretter aujourd'hui celle de Georges Rodenbach.
Et tandis que je feuillette ses livres pour en dire quelques mots, la vue d'une dédicace écrite de sa propre main et devant moi, dix jours avant sa mort, me ramène à d'autres pensées qu'à celles de critique littéraire – et un autre Rodenbach que celui de ses romans et de ses vers, un Rodenbach m'apparaît connu seulement des intimes et des quelques « jeunes » qu'il recevait avec tant de cordiale simplicité. Dans son cabinet de travail clair, joyeux de vaste lumière, que n'encombrent pas les meubles inutiles – à peine quelques bibelots sur la cheminée du style le plus moderne – dans son cabinet de travail où il recevait le dimanche, Rodenbach, en coin de feu grenat avec, à la boutonnière, le trait rouge de la légion d'honneur, une cigarette aux doigts, Rodenbach parle. Il parle avec de grands gestes, comme s'il était du Midi, mais de doux gestes lents, empreints d'une mièvre élégance, car il est du Nord ; sa voix fine emplit cependant toute la pièce, tant elle est convaincue de la chose et sûre de l'expression : et il parle longtemps, sans une hésitation, avec, dans les mots, un à-propos d'autant plus parfait qu'on le remarque à peine, avec des tours originaux ; comme pour faire pénétrer davantage la parole, le regard profond et très doux va droit dans vos yeux, vous soumet et vous persuade – et vous restez muet sous le charme de cette parole qui coule simplement sans violent éclat, mais pleine de lumière tantôt atténuée, tantôt vive, pareille à un fleuve du Nord., au moment où le soleil, au matin, le caresse, sans encore le frapper de ses plus brillants rayons.
Car Rodenbach était un causeur exquis.
La dernière fois que je l'ai vu, deux semaines à peine avant que la mort l'emportât, il nous parla de Daudet et de Mallarmé. (Un « jeune », qui venait demander au maître, une page de lui pour La Cité d'Art, une revue d'espérance, était là [I]).
Rodenbach nous dit quels délicieux causeurs étaient, chacun, bien entendu, avec la tournure très originale et opposée de leur esprit, Daudet et Mallarmé. Il termina par ces phrases profondes :
« - Daudet va si loin dans le Mystère qu'il y rencontre, toujours, la Vie. Daudet et Mallarmé, pour faire le tour de la pensée, partaient toujours en se tournant le dos : aux antipodes, parfois, ils se croisaient sur le même chemin ; la rencontre durait une seconde ! »
Je songeait, en l'écoutant, qu'entre Daudet et Mallarmé, Rodenbach, dans la conversation, ne devait pas être inférieur.
Et cependant, bien grande était sa modestie.
La première fois que j'allais le voir, il entendit naturellement que j'étais méridional. Comme je me levais pour partir, je ne sais par quoi il fut amené à dire que la plupart des « hommes du jour » étaient du Midi ; puis, avec une aimable ironie, il ajouta :
« - Aujourd'hui, pour être un grand homme, il faut être méridional. Vous connaissez sans doute le mot de Daudet. Un débutant qui n'avait pas encore débuté va le voir,
« - D'où êtes-vous ? Lui demande Daudet.
« - De Lille,
« - Comment ! Vous n'êtes pas du Midi ! Mais que venez-vous faire à Paris, mon cher Monsieur ?
« - Daudet, comme moi, vous le voyez, pensait qu'aujourd'hui, pour être un grand homme, il faut justifier d'une naissance méridionale ».
Et Rodenbach me tendit la main.
- Vous êtes, lui-je en la prenant, un exemple contraire !
Il rougit un peu, puis, prenant sans doute son parti de l'éloge, il répondit en riant :
- Si jamais je suis cet exemple, ce sera un mauvais exemple, dans tous les sens du mot « mauvais », ou une exception qui ne fera que confirmer la règle, humblement...
C'était de la plaisanterie, mais sous les mots, je vis la pensée, et jamais plus je ne fis à Rodenbach des éloges – que cependant il méritait ; - car il est des hommes qui sont plus grands que l'éloge. Depuis je suis allé voir souvent le Maître, si bon, si modeste, et dont la parole était un charme continuel.
Et plus que ses livres encore, je crois que cette parole attachait les hommes à lui, car elle pénétrait jusqu'à l'âme et forçait avec douceur la sympathie, puis, progressivement, l'affection. Nombreux en effet, étaient ses amis : Mallarmé d'abord, et E. de Goncourt, Daudet. Puvis de Chavannes, de qui il vait de nombreux dessins dont il était justement fier ; Rodin, Besnard, Champsaur, qu'il connut au Quartier latin ; Catulle Mendès, ... mais je devrais citer presque tous les hommes de vrai talent, tous les artistes, les poètes, les écrivains de grand coeur.
Rodenbach ignorait, d'ailleurs, cette jalousie que l'on croit si fréquente entre écrivains, et je comprends qu'un homme de talent qui sait estimer ses confrères se puisse facilement aimer.
Comme je lui parlais de Pierre Louÿs, qu'il admirait beaucoup, malgré la différence des tempéraments, voici ce que Rodenbach me dit un jour :
- Louÿs, dans Les Chansons de Bilitis et Aphrodite me semble un dieu grec fait homme et qui aurait dormi dans un tombeau, près d'Athènes, jusqu'à nos jours. Puis réveillés, il serait venu en France, se serait accoutumé aux mœurs modernes avec une résignation fataliste et aurait écrit un excellent moderniste français – mais en se souvenant de l'Olympe !
- Et La Femme et le Pantin ? Dis-je.
- Ah ! Reprit Rodenbach avec un fin sourire, le dieu grec a été adoré sur un autel, en Espagne, dans de l'ombre et du soleil ! Mais le socle de sa statue avait servi, jadis, à quelque Vénus antique – et le Dieu s'en souvient !...
De plus dignes d'en parler que moi ont dit le talent du poète et du romancier, le commerce délicieux de l'ami – mais, humblement, j'ai voulu jeter un adieu attristé sur la tombe à peine fermée du Maître qui recevait les « jeunes » avec tant de bonté, de l'écrivain pour qui, après avoir eu de l'admiration, j'avais maintenant une respectueuse sympathie, de l'homme enfin que j'aurais, si la Mort ne nous l'avait injustement ravi, et en continuant à le voir, profondément aimé.

Jean de La Hire.
L'Aube Méridionale, N° 12, 25 février 1899.

[I] Les Lampes de Georges Rodenbach, parurent dans le numéro 2 de février 1898 de la Cité d'Art. Frédéric Saisset y écrira l'article consacré à la mort de l'auteur de Bruges la morte dans le numéro 1, deuxième année, de janvier 1899.




mercredi 22 septembre 2010

Victor Barrucand : Avec le feu. Réédition Libretto.


« C’est le roman social et romanesque le plus émouvant et le plus parfait d’un siècle en quête d’aventures ».
Félix Fénéon


En 1900, Victor Barrucand est envoyé en Algérie par la Ligue des Droits de l'homme afin de contrecarrer la montée des antisémites, Drumont et Régis, qui ce sont fait élire en 1898, le premier comme député, le second comme maire d'Alger. Il devient rédacteur en chef du quotidien Les Nouvelles, et mène campagne contre Drumont. C'est cette année là, que paraît chez Eugène Fasquelle, son roman Avec le feu, est-ce l'absence de Barrucand de Paris, dès le printemps, qui explique que son livre semble être passé relativement inaperçu (1) ? Avec ce roman, ce sont les années 1890, les années de combats anarchistes qui se terminent pour Barrucand, une page qui se tourne. Son implication dans les revues (2), ses amitiés, ses engagements (3), font de Barrucand l'auteur idéal pour rendre-compte de cette période et des imbrications entre le mouvement anarchiste et les milieux littéraires.
Dans Avec le feu, les différentes thèses anarchistes sont représentée par les personnages : Robert est attiré par la propagande par le fait et envisage de se tourner vers le terrorisme, Meyrargues y incarne l'écrivain dilettante, alors que le peintre Brandal est un sympathisant et que le musicien Vignon représente l'artiste génial, retiré du monde. On peut tenter de mettre des noms réels sur chacun de ces personnages, pourtant Barrucand ne semble pas avoir voulut faire un roman à clefs, il utilise les faits et les hommes qu'il a connu pour « interprêter » l'histoire, comme l'écrit Ghéon, et en rendre subtilement la complexité.
Mieux que Camille Mauclair dans Le Soleil des morts, Barrucand fait vivre les difficultés rencontrés par les artistes à concilier l'art et l'action, la littérature et le militantisme actif. Parmi les romans consacrés à cette période de bouillonnement des idées et d'explosions de marmites, Avec le feu, est une véritable réussite. Écrit dans un style simple, direct, il tranche avec les fioritures stylistiques d'un Rosny dans Les Ames perdues (4), contrairement à Henri Raynaldy dans Delcros, il construit son roman pour qu'il soit à la hauteur de ses ambitions, il ne cède pas à la facilité, et évite les caricatures (5).

Il faut donc saluer Eric Dussert et les éditions Phébus d'avoir rééditer ce "classique inconnu", que l'on trouve aujourd'hui dans la collection Libretto.


(1) Il ne semble pas y avoir eut de compte-rendu dans La Plume, ou dans le Mercure de France.
(2) Il dirigea avec son ami Félix Fénéon l'Endehors de Zo d'Axa lorsque celui-ci dut s'enfuir.
(3) Voir sa campagne pour le "Pain gratuit", ou encore pour un théâtre populaire et... gratuit.
(4) J.-H. Rosny : Les Ames perdues. Fasquelle, 1899.
(5) Henri Rainaldy : Delcros. Société libre d'édition des gens de lettres, 1898. Voir le compte-rendu de Barrucand sur ce roman dans la Revue Blanche (1898, tome XVI).

Victor Barrucand : Avec le feu. Préface d'Eric Dussert. Phébus, Libretto, 2010. 256 pp. bibliographie. ISBN 978-2-7529-0480-5. 11€. Libella.fr

En 1900.

Victor Barrucand : Avec Le Feu


L'époque héroïque de la bombe est assez lointaine pour qu'on en puisse parler posément, justement. Ce fut un temps de curieuse inquiétude morale que les romanciers qui en traitèrent semblent avoir assez compris jusqu'ici, en tout cas très peu exprimé. Ceux qui ne s égarèrent pas dans d'ennuyeuses théories s'exaltèrent presque uniquement sur la beauté du geste, extérieure, plastique. Au lieu d'en rechercher les causes profondes et cachées, ils s'amplifièrent au profit de leur seul lyrisme et nul encore n'avait tenté l'étude sentimentale de l'anarchie que M. Victor Barrucand nous propose aujourd'hui. Les tragiques événements de l'année 1894, eussent fourni une abondante matière aussi bien à un livre précis d'histoire qu'à une fable pittoresque ; les documents ne manquaient pas. M. Victor Barrucand, plus renseigné qu'aucun, n'en n'a point voulu faire usage. Il constata, rappela les faits et les dates, simplement, et l'exacte réalité lui fut une sorte de décor vivant, un prétexte surtout au développement des caractères – à quoi il s'attacha particulièrement. Loin de copier, il créa. Il interpréta l'histoire. L'incident qu'apparaîtra aux yeux de la postérité la propagande par le fait, devient dans ce livre, le signe de tout un mal contemporain et le symptôme révélateur d'une crise d'humanité, non encore achevée peut-être, - et son importance en grandit d'autant,. Le héros, aussi bien, résume avec toutes ses nuances un état d'esprit commun à beaucoup, - à tous ceux qui manquèrent agir, et n'agirent point ; auprès de cette collectivité douloureuse, qu'est-ce que la personnalité brutale d'un Vaillant ou d'un Emile Henry ? Robert connaît la lassitude, et le dégoût. Il s'en sauvera par l'action – mais laquelle ? Par la destruction bien plutôt ! Il s'exalte, il compte sur l'occasion : et elle s'offre. Mais il connaît la lâcheté, le doute : tout n'est-il pas vain et même cela ? Le moment est passé d'agir, Robert se tue. - Psychologie rigoureuse et humaine ; de l'orgueil, de la faiblesse, et surtout, la peur de la vie, de ses luttes vivifiantes et joyeuses. Telle n'est peut-être pas la pensée de l'auteur, mais tout dans son livre l'impose. A côté de l'anarchiste Robert, voici, comme deux « répliques » de son âme, le vieux musicien Vignon qui garde pour lui son génie, et sa fille pour elle sa beauté ; eux plus que lui encore en révolte contre la vie, soucieux de ne rien « risquer » ; un jour viendra qu'il se tueront. Nous sommes loin du grand égoïsme de de Nietzsche qui est tout compréhension après avoir été tout action et passion. Manière aussi d'aristocratie, mais peut-être trop accessibles aux faibles... - et s'il nous faut choisir !... - On voit l'importance historique et psychologique d'un tel livre. M. Barrucand ne l'a pas chargé de digressions, ni couvert d'ornements. Il l'a presque en entier dialogué, réduisant au stricte nécessaire les discussions, laissant directement s'exprimer ses héros, sans explications ni rétrospections. Cette brièveté – je ne dis point cette sécheresse – console des rhétoriques faciles auxquelles on s'adonne chaque jour davantage, et cette objectivité, de la « manière » que tout écrivain se croit désormais forcé d'adopter, oubliant que l'art classique est le plus souvent anonyme.

Henry Ghéon.

La Revue Blanche, 1900, tome XXII.





Voir :
L'excellent site de Céline Keller sur Victor Barrucand.
La longue analyse de Avec le feu par Caroline Granier dans Les Briseurs de formules, les écrivains anarchistes en france, à la fin du XIXe siècle. Editions Ressouvenances, Coeuvres, 2008.




Affaire Adelsward. Messes Noires, l'Assiette au Beurre.


Messes noires


Pour compléter le dossier de l'affaire Adelsward-Fersen, il me semblait nécessaire de consulter le numéro 141, du 12 décembre 1903, de l'Assiette au Beurre. La lecture de bibliographies sur le sujet m'y incitaient. Après consultation, il faut bien admettre que les bibliographes ne lisent pas tous les documents qu'ils donnent en référence. Si en effet le numéro est intitulé Messes Noires, il ne concerne pas réellement l'affaire qui nous intéresse. Seule l'illustration que l'on trouvera ci-dessous rappelle les "Messes noires" reprochaient à Jacques d'Adelsward et Hamelin de Warren. Il faut pourtant constater une coïncidence de date, en effet en décembre 1903 avait lieu le procès des deux hommes. Les titres des journaux ont put influencer l'illustrateur et l'inciter à mettre en scène des "adolescents malsains et équivoques". invoquant Satan. Quant aux raisons qui ont fait que les chroniqueurs ont adopté ce titre de "Messes noires", Me Grandgousier s'en expliquait dans le Matin du 29 novembre 1903, convenant qu'il n'était "guère justifié" pour qualifier cette affaire, mais qu'il était "très commode" car grâce à "cet euphémisme à la fois moyenâgeux et modern-style, ceux qui peuvent sans danger nous entendre devineront aisément : les autres ne chercheront pas, j'imagine, bien longtemps, et ne trouveront point...".


Déception :

Un lot d'adolescents malsains et équivoques
Attend éperdument le Prince des démons.
Ils disent : - « Viens vers nous, Maître que nous aimons,
Nos lèvres te supplient et nos bras te provoquent. »

Sur le corps énervé de quelque jeune femme,
Anxieuse, elle aussi, de l'infernal amant,
La Messe Noire va dérouler lentement
Ses stupides répons et ses rites infâmes,

Mais l'Archange est sans doute en train de visiter
Bien d'autres fabuleux et tristes imbéciles ;
Il se refuse à fréquenter leur domicile
Et depuis plusieurs soirs les laisse poireauter.

Jehan-Rictus


Illustrations de Manuel Orazi.


Affaire Adelsward-Fersen (1e partie)
Affaire Adelsward-Fersen (2e partie)
Affaire Adelswärd-Fersen (3e partie)
Interview de J.-K. Huysmans. Affaire Adelswärd-Fersen (4e partie)
Affaire Adelswärd-Fersen (5e partie)
Affaire Adelswärd-Fersen (6e partie)
Affaire adelswärd-Fersen (7e partie)
Un article de Gaston Leroux. Affaire Adelswärd-Fersen (8e partie)
Interview de Jules Bois. Affaire Adelswärd-Fersen (9e partie)
Affaire Adelsward-Fersen (10e partie)
Le Canard Sauvage. Philippe. Jarry. Affaire Adelsward-Fersen (11e partie)
Alfred Jarry, Lucien Jean, Georges Roussel. Affaire Adelsward (12e partie)
Affaire Adelsward-Fersen (13e partie).
Affaire Adelsward-Fersen (14e partie).

mardi 21 septembre 2010

D'Adolphe de la Hire d'Espie à Jean de la Hire. 1898-1899


Suite à la publication de la bibliographie de la revue L'Aube Méridionale, je reviens sur son directeur, Adolphe d'Espie, plus connu sous le nom de Jean de la Hire, et plus particulièrement sur ses débuts dans cette revue, avec quelques textes qu'il y publia.



Le directeur de la très régionaliste revue L'Aube Méridionale publiée à Béziers, Adolphe de la Hire d'Espie, est né Adolphe d'Espie à Banyuls-sur-mer en 1878. Son père le comte Célestin d'Espie y est viticulteur. C'est sous le nom d'Adolphe de la Hire d'Espie qu'il publie à partir de 1898, de nombreux articles dans L'Aube Méridionale et qu'il fait paraître, la même année, son premier roman La Chair et l'Esprit chez Edmond Girard (1). Il rendra compte lui-même de son roman dans la chronique « Romans » de juillet 1898, il s'y corrige et montre une certaine lucidité quand à la portée d'un article dans une « petite revue », mais n'oublie pas de rendre hommage à son éditeur-imprimeur Edmond Girard.



La première série de la revue est publiée à Béziers de Janvier à Juillet 1898, après un arrêt de deux mois, elle reparaît à Montpellier en octobre. Dans l'intervalle, l'adresse de la Hire, change, il n'habite plus Banyuls-sur-mer, mais 14, rue Gay-Lussac à Paris.

On notera que La Hire donne dans L'Aube Méridionale un fragment de La Chair et l'Esprit, ainsi qu'un fragment de son roman de mœurs provinciales, Les Vipères, un dialogue entre bonnes dames de Banyuls-sur-mer. Son admiration pour Pierre Louÿs l'amène à chroniquer, dès le premier numéro de sa revue, Les Chansons de Bilitis, volume publié en 1894, mais réédité en 1898, augmentée d'une bibliographie. Comme d'autres il se laisse prendre à la supercherie de Louÿs, et prend ce livre pour une traduction. Sa bévue est réparée dans le numéro de juillet 1898 dans sa chronique « Les Périodiques ».

Dans l'article du numéro de décembre 1898 - janvier 1899, consacré à la mort de Jean Tinan, la Hire attribue aux excès et aux drogues la fin prématurée de l'auteur d'Aimienne. Sans rien affirmer, il fait plus qu'insinuer... Si l'on ne peut réfuter le noctambulisme de Tinan, il y a pourtant loin a voir en lui un amateur de drogues, à l'égal d'un Dubus ou d'un Tailhade. Sur sa lancée, la Hire en profite pour faire le procès de la génération précédente et termine son article par un hymne au soleil, à la simplicité et à la santé. Oubliant quelques chefs-d'œuvres anciens il affirme même que ceux-ci ne peuvent sortir d'un «cerveau détraqué et d'une main tremblante».

Le 25 février 1899 son article nécrologique sur Georges Rodenbach est signé d'un nouveau pseudonyme : « Jean de la Hire ». C'est sous ce nom qu'il se fera connaître d'abord dans le milieux des petites revues littéraires, puis qu'il signera nombre de ses romans.

Jean de la Hire sera éditeur, il dirigera la Librairie Universelle et créera, avec sa femme, Marie Weyrich, La Bibliothèque indépendante (2).

Dans la suite de sa longue carrière, Jean de la Hire, utilisera d'autres pseudonymes, et avec facilité, abordera les genres littéraires les plus divers, il connaîtra en 1907 un grand succès avec un roman de science-fiction La Roue fulgurante, il deviendra alors feuilletoniste, romancier populaire, se jouant de tous les genres ; aventures, fantastique, romans scouts, récits de capes et d'épées.

Jean de La Hire fier de ses débuts dans la littérature, prétendait avoir renoncé à un destin d’académicien en abandonnant le roman littéraire pour la littérature de genre. Pourtant si l'on se réfère à ses publications des années 1900, comme Le Tombeau des Vierges, "Livre d'élégances pompadouresques" publié chez Offenstadt, dans la collection Orchidée, et illustré par la photographie, il apparaît que la nécessité (ou le goût) d'écrire de la littérature légère lui est venu assez tôt. Il n'y a en effet pas loin des publications d'Offenstadt, romans vaguement érotiques, à celles de Ferenczi, Tallandier ou Fayard. On peut même dire sans trop se tromper que bien de ses romans de genre (La Roue fulgurante, Les mystères de Lyon (3)) dépassent en qualité ses premières tentatives. La vie de Jean de la Hire, romancier populaire est assez bien connue, et l'on trouvera sur l'internet de nombreuses notices sur ses différentes expériences d'auteur caméléon (4).

(1) Voir dans Livrenblog La bibliographie des éditions Edmond Girard.

(2) Voir l'article d'Eric Dussert dans L'Alamblog : Petite Bibliographie lacunaire de la Bibliothèque indépendante d'édition

(3) Les mystères de Lyon : Réédition Marabout (1045 – 1046), 1979.

(4) Voir notamment Jean de la Hire, un comte populaire. Un dossier du Centre International Stanislas-André Steeman de la Communauté française à Chaudfontaine.

Voir : Jean de la Hire : Mémoires inedits sur Pierre Louys. Edition présentée et annotée par Hubert Juin. 1979, aux Editions à l'Ecart.


Textes :

Les Romans. La Chair et l'Esprit par A. de la Hire d'Espie, (Edmond Girard, Paris)

« Puisque je me suis chargé de rendre compte des romans parus, il est tout naturel que je parle de La Chair et l'Esprit. Et il est vrai que j'aurais pu confier ce travail à l'un ou l'autre de mes collaborateurs et amis qui aurait crié : « Ohé ! Un chef-d'œuvre vient de paraître ! Achetez le chef-d'œuvre ! Il s'appelle La Chair et l'Esprit, ne porte pas la feuille de vigne et ne coûte que trois francs ! » En vérité, c'aurait été très beau, et me voilà tout-à-coup devenu grand homme... dans un numéro d'une petite Revue. J'ai préféré dire moi-même ce que je pense de mon premier livre, c'est plus original et ce sera moins ridicule. Je ne sais qu'il y a beaucoup de mauvais. En certains passages, le style est lâche, la phrase s'affaisse et tombe comme la « bonne femme » de Mahoudeau, dans l'Oeuvre de Zola, et ces passages sont nombreux surtout dans les trois premiers chapitres. Comme il serait trop long d'énumérer tous les défauts de ce livre, je prendrai le plus apparent ; - La scène – anecdotique d'ailleurs et peu importante – entre l'avocat et Adrienne, au chapitre deuxième, est complètement manquée. J'ai voulu rester le plus près possible de la réalité, et j'ai eu tort. Au lieu de peindre l'avocat en question comme il est, c'est-à-dire vieux et laid, j'aurais été mieux inspiré en le faisant jeune et beau. Adrienne aurait eu aussi beaucoup plus de gloire à lui résister, la scène serait devenue plus piquante, j'aurais enfin brisé le moule de l'avocat poncif et pompier et Maître Jean n'aurait pas pu se fâcher de ce que je connais son histoire – bien que s'il se fâche de ce que je connais son histoire – bien que, s'il se fâche, cela me soit parfaitement égal. - C'est une bêtise littéraire que, dans un autre genre, je ne recommencerai pas. Et si, à propos de ce livre, il y a des éloges à exprimer, c'est à l'éditeur Edmond Girard qu'ils sont dus. Émule des artisans artistes du moyen-âge, pareil à ce potier dont parlait André Theuriet, Girard fait seul, avec l'aide d'une collaboratrice dévouée, tout le travail de ses éditions ; je crois, moi qu'il n'y fera pas fortune, et c'est justement pour cela qu'une telle tentative, qui est de l'art le plus pur et le plus élevé, mérite d'être signalée. »

A. de la Hire d'Espie.

L'Aube Méridionale, N° 6, juillet 1898.


Les Chansons de Bilitis, roman lyrique de M. Pierre Louÿs.

Malgré ma résolution de traiter Paris comme la province d'un pays dont le Midi serait la glorieuse capitale, je ne puis m'empêcher de trouver beau le livre que M. Pierre Louÿs vient de publier à Paris. Il est vrai que Les Chansons de Bilitis, sont une traduction, et la traduction d'une oeuvre, la plus méridionale qui soit, d'une oeuvre grecque, c'est-à-dire de soleil, et le soleil, c'est le Midi.. - C'est donc un ouvrage éclos sous le soleil et non point sous les brumes que j'ai à examiner : cela me rend la tâche aussi agréable que facile. M. Pierre Louÿs nous avait donné Aphrodite, bon livre parce que livre de joie. - Les Chansons de Bilitis sont un bon livre, d'abord parce que belle et naturelle poésie, ensuite parce que c'est de l'amour. Un amour cependant que je ne conseillerais pas aux femmes, car il est un vol fait aux hommes, et, ma foi ! Je ne suis pas encore assez converti au féminisme pour abandonner aux femmes cela surtout que, souvent, elles ont de bon, c'est-à-dire leur chair.
Je suis peut-être obscur. Ah ! C'est que je voudrais pas être immoral en parlant d'un livre dont la moralité n'est sauve que par la toute-puissance de la Simplicité, de l'Amour et de la Beauté !
Et puis – inclinez-vous, M. Bérenger, devant le génie grec – c'est une traduction – Bilitis composa de beaux vers, M. Pierre Louÿs les traduit avec un amour et une simplicité qui les fait aimer – et il a l'incomparable bon sens de les traduire en prose. Entre les mains d'un autre traducteur, Les Chansons de Bilitis, auraient pu devenir des fleurs empestées. La gloire de M. Pierre Louÿs – et c'en est une grande – est d'avoir conservé à des fleurs de naïve perversité de tendres et chastes parfums.
Si M. Pierre Louÿs, au lieu d'être le traducteur avait été l'auteur, je dirais que c'est moins bien qu'Aphrodite ; il s'est contenté d'être un fidèle écho, je dis – en ce cas spécial – que c'est mieux.
Et si vous ne me comprenez pas, lisez Les Chansons de Bilitis : vos yeux s'ouvriront.

A. de la Hire d'Espie.

L'Aube Méridionale, N° 1, janvier-février 1898.


Les Périodiques.

« Dans l'Ermitage, Charles Guérin s'entretient, « sous les quinconces », sur Les Chansons de Bilitis, si belles, si dignes d'être un chef-d'œuvre antique que je me suis laissé, naguère, prendre au piège, et que j'ai cru, avec bien d'autres, à une traduction. J'admirais Pierre Louÿs d'avoir si bien traduit, je l'aime maintenant, d'avoir si délicieusement créé. »

A. de la Hire d'Espie.

L'Aube Méridionale, N° 6, juillet 1898.


La Mort de Jean de Tinan.

Avec d'inutiles réflexions banales.

I

Après Mallarmé, après Puvis de Chavannes, un autre de ces hommes qui ne devraient point mourir est parti. Il était jeune, mais il avait assez fait pour prouver que, peut-être, plus tard, il aurait été dans l'Art aussi grand que ces deux maîtres.
Après quatre mois de maladie, à 24 ans, Jean de Tinan est mort, et nous lui devons, nous dont il était à peine l'aîné par l'âge, mais le maître par les connaissances et le talent, exprimer ici nos regrets.
Savant dans toutes les sciences, - critique, philosophe, musicien, polyglotte, poète, romancier – Jean de Tinan a donné au Mercure des travaux de biologie ; il a fait de la critique de cafés-concerts, un roman : Penses-tu réussir ? (sic, pour !) - dont un chapitre parut dans L'Ermitage - où il raconte ses souvenirs du Quartier-Latin et de Montmartre et décèle la personnalité de son esprit ironique et délicat ; des revues allemandes ont publiés de lui des essais sur Wagner ; à des revues anglaises il a donné de profondes analyses philosophiques (1). Il est plein de vigueur, de subtilité dans le Traité de l'impuissance d'aimer (2), tandis que d'exquises délicatesses font le charme de l'Exemple de Ninon de Lenclos, amoureuse.
Une telle variété dans les facultés de l'esprit, une telle force dans de si divers talents se rencontrent peu – et bien aveugle est la mort qui s'abat sur de telles têtes... il y en a tant qu'elle pourrait frapper sans dommage !
Que Jean de Tinan, reçoive donc encore les profonds regrets de nous, les plus jeunes, qui lui étions inconnus, qui l'admirions sans le connaître, mais qui espérions monter plus tard près de lui ou, au moins, immédiatement au-dessous.


II

Mais en dehors de ces regrets, la mort de Jean de Tinan m'inspire des réflexions, et c'est maintenant pour mes camarades, pour de ceux mon âge et de ma génération que j'écris. On peut presque dire de Jean de Tinan qu'il est mort de maladies qui, telle la mélancolie en dix-huit cent trente, étaient tout récemment et sont peut-être fort encore à la mode parmi les jeunes littérateurs. Je veux parler du noctambulisme, de l'éthéromanie, de la morphinomanie, de tous ces goûts dépravés qui poussent l'homme à s'enivrer de haschich, d'absinthe, à respirer de l'éther, à fumer de l'opium, à s'injecter de morphine, à faire de la nuit le jour et du jour la nuit...
Certes, je me garderais bien du moindre reproche à la mémoire de Jean de Tinan, je m'en voudrais d'accuser et de condamner, j'ai de trop fortes raisons pour aimer et respecter le mort, - mais je constate. Je constate d'une génération, celle qui nous précède immédiatement, a eu ces maladies, je ne l'en blâme pas, si j'en avais été, peut-être aurais-je fait comme elle, fatalement...
Mais je tiens à dire aux très jeunes, qui marchent avec moi ou qui me suivent, que l'artiste n'a pas besoin d'excitants factices. Un esprit bien doué a déjà trop de vigueur par lui-même : c'est la détruire que vouloir l'augmenter. Et si je parle ainsi, c'est que j'en connais, dont la conviction est qu'un beau vers se trouve au fond d'un verre d'absinthe ou dans les hallucinations provoquées par le haschich.
« Le vrai littérateur – dit Théophile Gautier – n'a besoin que de ses rêves naturels, et il n'aime pas que sa pensée subisse l'influence d'un agent quelconque ». Et l'on sait la répugnance de Balzac pour ces boissons et ces substances qui enlèvent à l'homme sa volonté, et le font penser, comme dit Baudelaire, malgré lui-même.
Tout ce que je dis là est peut-être profondément ridicule, et je prends des airs de vieux Mentor. Certes, j'aimerais mieux en rire ! Mais la mort précoce de Verlaine ; mais l'abaissement de Charles Morice qui, après avoir écrit le beau livre qu'est La littérature de tout à l'heure, fait maintenant du reportage à l'occasion d'un couronnement de reine ; mais le continuel mauvais état de santé de Laurent Tailhade ; mais la mort de Jean de Tinan, et beaucoup de talents perdus : ces morts et ces ravages m'effrayent, car l'éthéromanie, l'alcoolisme et le noctambulisme en sont les principales causes, sinon les seules.
C'est la vie, la vie saine, forte, pure, la vie de soleil et de travail qui donne la divine force ! Ce qui triomphera demain, c'est l'énergie ; - et la morphine, l'absinthe, les nuits passées à autre chose qu'à travailler et à dormir, sont les tueuses de l'énergie.
Et puis, la vie de l'artiste est déjà trop courte pour la grandeur de l'œuvre à édifier ! Que sera-ce, si l'artiste l'abrège encore ?...
Quand je fondai cette revue, je la mis – elle, mes collaborateurs et moi-même – sous la protection du Soleil, du dieu Soleil ! Cela fit rire certains poètes, mais cela plut à un écrivain qui vaut mieux que tous ces poètes, et qui m'encouragea dans la voie lumineuse où je m'engageais, - je ne le nomme pas, car en affichant ma gratitude, je craindrais de la prostituer. - J'habitais alors les rivages de la mer bleue. J'habite Paris maintenant, mais je n'ai pas changé. Le Soleil, la simplicité et la santé enfantent la Vie ; la nuit, les sensations dépravées et la maladie enfantent la Mort. Ce n'est jamais d'un cerveau détraqué et d'une main tremblante que sortira un chef-d'œuvre...
Mais je suis fou d'insister ! Bien rares, sans doute, ceux qui liront cet article, et je n'ai pas la fatuité de croire qu'ils s'en souviendront cinq minutes après. Qu'on me pardonne ces réflexions à propos d'une mort très regrettable.

Adolphe de la Hire.

Paris, décembre 1898.

L'Aube Méridionale, décembre 1898 - janvier 1899


(1) En relisant la bibliographie de Jean de Tinan je ne retrouve pas d'articles donnés à des revues allemandes ou anglaises.

(2) Un document sur l'impuissance d'aimer, récit. L'Art indépendant, 1894.

Voir : L'Aube Méridionale, Georges Rodenbach par Jean de La Hire. Jean de la Hire, Maîtresse de Roy. Jean de La Hire : Incestueuse. 1901. dans Livrenblog.

Jean de Tinan dans Livrenblog : Le Centaure Vol. II. Une photo de Mina Schrader, esthéte et anarchiste. Jean de Tinan : La Princesse des Ténèbres par Jean de Chilra / Rachilde. Willy, Tinan, Rosny. Jean de Tinan / Willy, petite revue de presse, (Rachilde, Jean de Loris, Simiane). L'Exemple de Ninon de Lenclos Amoureuse par Paul-Louis Garnier. Jean de Tinan par Paul-Louis Garnier. Maîtresse d'Esthètes par Papyrus. Le Divan : Le souvenir de Jean de Tinan. Jean de Tinan Sappho.



dimanche 19 septembre 2010

L'Aube Méridionale 1898-1899. Dir. : de la Hire d'Espie




L'Aube méridionale

Mensuelle
Littéraire, Artistique et Sociales

Directeur : Adolphe de la Hire d'Espie.

9, rue de la Corderie, Béziers (adresse de l'imprimeur-gérant), puis, bureaux : 10, rue Four Saint-Eloy, Montpellier.
Les envois doivent être adressés à M. de La Hire d'Espie à Banyuls-sur-Mer (Pyrénées-Orientales)

La première série s'arrête au n° 6 de juillet 1898.
La revue ne paraît pas en août-septembre, durant cette période les envois doivent être adressé à Ernest Gaubert à St-André de Sangonis (Hérault). La deuxième série commence en octobre 1898 avec le N° 7/8.

Publiée de janvier-février 1898 à juillet-août 1899.

N° 1. Janvier-Février 1898.

A. Maffre de Baugé : Lettre. Antonin Maffre : L'Aubo Mièjournalo. Marc Varenne : Tes Mains. Ernest Gaubert : Sois douce. A. de la Hire d'Espie : Au soleil. P. de Maynie : Fusain. Cathule Vinval : Notes d'art. A. de la Hire d'Espie : et E. Gaubert : Bibliographie.

N° 2. Mars 1898.

Ch. Henry Hirsch : Confidences. Jane Duvl : L'Art et la Femme de Province. Antonin Maffre : Prumié poutou. Marc Varenne : Soirs. A. de la Hire d'Espie : Au Soleil. Ernest Gaubert : Les Jets d'eau dans les parcs... Cathule Vinval : Notes d'Art. A. de la Hire d'Espie : Journaux et Revues. A. M. : Echos.

N° 3. Avril 1898.

Francis Viélé-Griffin : Plaine de France. Antonin Maffre : Maffre Ermengaud. Achille Maffre de Baugé : Erin. Ernest Gaubert : Les Poètes, quelques mots à propos de vers libre. Marc Varenne : Doute. Albert Arnaud : Ferdinand Fabre. A. M. : Çà et là.

N° 4. Mai 1898.

Paul Fort : Ballade Française. Emmanuel Delbousquet : Orgueil. A. de la Hire d'Espie : Au Soleil. A. Maffre de Baugé : Venise. Elaine Hellys : A Chrysis. P. Hortala de Maynie : L'Amie. Marc Varenne : Chanson de Pluie. Revue du Mois : A. de la Hire d'Espie : Les Livres. Ernest Gaubert : id. A.M. : Les Périodiques.

N° 5. Juin 1898.

Henri Géhon : Chanson au Bois. A. de la Hire d'Espie : Fragment. Emmanuël Delbousquet : Les Chênes-Liège. P. Hortala de Maynie : Les Souvenances. Ernest Gaubert : Les Mains tendues vers la clarté. Revue du Mois : Ernest Gaubert : Littérature. De MayniéVarenne : Les Poèmes. A. de la Hire d'Espie : Les Romans et les Périodiques.

N° 6. Juillet 1898.

Antonin Lavergne : Ainsi parla l'amant. Frédéric Saisset : Douzain. Yvanhoé Rambosson : Duos interplanétaires. Abel Letaille : Le Solitaire. Léopold Dauphin : Rondels Précieux. Ernest Gaubert : Fragment initial d'une Introduction au Légendaire (A propos d'Yvelaine de Ch. Henry Hirsch.). Antonin Maffre : Neneto. Revue du Mois : Ernest Gaubert : Littérature. De Maynie-Varenne : Les Poèmes. A. de la Hire d'Espie : Les Romans et les Périodiques.

Deuxième série.

N° 7 et 8. Octobre 1898.

Léopold Dauphin : A Stéphane Mallarmé, poésie. Léopold Dauphin : De Bichenic à Samoreau, poésie. Marc Varenne : Billet, poésie. P. Vigné d'Octon : Le Rucher de Pierre Débru. Edouard Ducoté : Amour, poésie. Maurice de Viau : L'Amant des Etoiles, conte. Raymond Ballut : La Voix qui s'est tue, poésie. A. de la Hire : Les Vipères, fragment. Paul Alavaill : Silio, poésie. Ernest Gaubert : Flore d'éveil, roman (I – II). Chroniques du Mois : Ernest Gaubert : Les Livres. Pierre Hortala : Les Périodiques. Elaine Hellys : La Sociologie. Marc Varenne : Le Félibrige. Les Provinces : Dauphiné par Jules Nadi. Lorraine par Paul Briquel. Bretagne par Marcel de Joegher. Poitou par Gabriel Coussol. Guyenne et Gascogne par Maurice de Viau. Languedoc (Béziers) par Eugène Métour. - Echos, L'Aube.

N° 9. Novembre 1898.

Jules Nadi : Les Proses chantantes. Pierre Hortala : La Halte, poésie. Maurice de Viau : Prose chimérique. Paul Briquel : Nocturnes, poésie. Ernest Gaubert : Nous. Magali : Despeloucade. Marc Varenne : Le Silence, poésie. Ernest Gaubert : Flore d'Eveil, Roman (II-IV). Les Provinces : Dauphiné par Jules Nadi. Lorraine par Paul Briquel. Poitou par Gabriel Coussol. Guyenne et Gascogne par Maurice de Viau. Languedoc (Toulouse) par Louis Roucau, (Béziers) par Eugène Métour. (Montpellier) par H. S.. Marc Varenne : Le Félibrige. Pierre Hortala : Les Périodiques. Echos : L'Aube.

N° 10 et 11. Décembre 1898, Janvier 1899.

Rémy (sic) de Gourmont : Les Feuilles Mortes, poésie (A Max Elskamp) (1). Richard Wémau : Lune des Pyrénées. Jules Nadi : Les Idées de M. Barrès. Marc Varenne : Ballade des trois saisons, poésie. A. de La Hire : La Mort de Jean de Tinan. Maurice de Viau : Rêve calme. Pierre hortala : La Légende des clous, poésie. Ernest Gaubert : Flore d'Eveil, roman (fin). Chroniques du mois : Ernest Gaubert : Les Livres. A.-D. Bancel : La Sociologie. Pierre Hortala : Les Périodiques. Les Provinces : Guyenne et Gascogne par Maurice de Viau. Roussillon par Antoine Orliac. Languedoc (Béziers) par Eugène Métour, (Montpellier) par Albert Signoret. Echos : L'Aube. En hors texte : Portrait de Miss Hella, composition inédite de Mlle Madeleine Dauphin.

(1) Dans l'édition originale de Simone, poème champêtre, 1897. Mercure de France, 1901, ainsi que dans l'édition de Divertissements, Crès, 1912, le poème ne comporte pas de dédicace.

N° 12. 25 Février 1899.

Ernest Gaubert : La Véritable histoire de Timon d'Athènes (fragment). A. Mauffre de Baugé : La Chanson des Trois Goëlands (poésie). Marc Varenne : Prose lointaine. Pierre Hortala : Prose lasse. Léopold Dauphin : Prélude (poésie). Jean de La Hire : Georges Rodenbach. Maurice de Viau : Pensée triste au printemps (poésie). Chroniques du Mois : Ernest Gaubert : Les Livres. A.-D. Bancel : La Sociologie. Marc Varenne : Le Régionalisme. Pierre Hortala : Les Périodiques. Les Provinces : Languedoc (Toulouse) par Louis Roucau. Lorraine par Paul Briquel. Poitou par Gabriel Coussol. Guyenne et Gascogne par Maurice de Viau. Echos : L'Aube.

N° 13. 25 Mars 1899.
Lucienne Kahn : Chemin fleuri (poésie). Louis Payen : Ariane. Marc Varenne : Le Silence, 2me fragment (poésie). Richard Wémau : Le testament de César Baruchard. Ernest Gaubert : Du Souvenir aux Lèvres (poésie). Jean Montagnier : Les Cloches. Louis Roucau : A Marcelle (poésie). Aimé Agussol : Un Jardi. Chroniques du Mois : Ernest Gaubert : Les Livres. Marc Varenne : Le Régionalisme. Pierre Hortala : Les Périodiques. Les Provinces : Dauphiné par Jules Nadi. Roussillon par Antoine Orliac. Languedoc (Toulouse) par Louis Roucau, (Montpellier) par Pierre Hortala. Echos : L'Aube.


N° 14 et 15. Avril et Mai 1899

Les Jeunes Poètes du Midi.

I. Guyenne, Gascogne, Béarn.

Maurice de Bellegarde de Viau : L'Etang. Georges Bidache : Ballade du passant joyeux. Elie Clavel : L'Echange. Emmanuël Delbousquet : La Tristesse du soir. Emile Escande : La Mort du vagabond. H. -P. Harlem : Angelus du matin. Raoul Laborderie : Abandon. Emile Magne : Crépuscule Dantesque, fragment. R. de Miranda : Fragment. Simin Palay : Aube d'amour. François Perey : Tandis que chantait le feu... Marc Varenne : Paroles lointaines. Jean Viollis : Paysage.

II. Languedoc et Comté de Foix.

Raymond Ballut : Regards sur la mort. Louis Bru : Sonnet. Jean Cazedessux : Les Nomades. Charles-Brun : Laisse le clair soleil... Ernest Gaubert : Hymnes pour elle. Pierre Hortala : L'Amie (fragment). Marc Lafargue : Le Tombeau du Musicien. Léo Larguier : Autel à la Lune. André Magre : Idylle. Maurice Magre : Le Juste. Camille Maryx : Le Vieux jardin. Louis Payen : Dans le soir. François Périlhou : Non loin d'ici... Louis Roucau : Consolation. Laurent Savigny : Cantilène. Paul Souchon : Louange de la Marne. E. A. Vaillé : Le Vagabond.

III. Roussillon.

Paul Alavaill : Pour l'Ophélie d'un soir. Jean Amade : Maison de l'amie. Pierre Camo : Pour les jours nouveaux. Antoine Orliac : Au Crépuscule. Frédéric Saisset : Les Arbres des forêts. Alphonse Talut : L'espoir du rêve.

IV. Provence et Dauphiné.

Edmond Jaloux : Chant de l'architecte. Jules Nadi : La Mort de Chrysis. Maurice Perrès : Dans le soir. Joseph Pouzin : A la Gloire des Voix.

N° 16. 25 Juin 1899.
Emmanuel Delbousquet : Trois Impressions de Courses à Toulouse. Pierre Hortala : La Petite Vieille (poésie). Jean de la Hire : L'Abbé Pompadour (Ch. XXII). Maurice de Viau : Soir d'hiver (poésie). Marc Varenne : Pour la terre – Toujours (poésies). Jean Montagnier : La Femme-Reine. Paul Vigné d'Octon : Lettre. Chroniques du Mois : Ernest Gaubert : Les Livres. Marc Varenne : Le Régionalisme. Les Périodiques : Pierre Hortala (Littérature française), Helaine Hellys (Littérature étrangère). Les Provinces : Lorraine par Paul Briquel. Poitou par Gabriel Cousol. Roussillon par Antoine Orliac. Echos : L'Aube.

N° 17 et 18. Juillet -Août 1899

E. G. : A nos amis. Laurent Tailhade : Déjanire et la tragédie. Pierre Hortola : Bombaika (poésie). A. Maffre de Baugé : L'Esthétique aux Arènes. Marc Varenne : Seul ! (poème). Richard Wémau : Réunion d'Intellectuels. Ernest Gaubert : Paroles de la Fiancé (poème). Nos Chroniques : Ernest Gaubert : Les Livres.


Je reviendrais très vite sur cette revue et sur son directeur, dont la carrière commencée sous le signe du régionalisme et du roman de mœurs, prendra un tout autre visage au vingtième siècle.


Bibliographies de revues dans Livrenblog :

Revue L'Image, bibliographie complète et illustrée.
Bibliographie de la revue Le Beffroi (1ère partie), (2e partie), (3e partie), (4e partie).
Bibliographie illustrée et complète du journal Le Pierrot (1ère partie), (2e partie), (3e partie), (4e partie).
La revue Palladienne de 1 à 10
.
Les Contemporains A. Le Petit F. Champsaur.
La Revue des Lettres et des Arts 1867-1868.
La revue Matines. 1897-1898.
Le Bambou, Bibliographie illustrée.

Le Carillon.
1893-1894
La Revue d'Art. 1896-1897.
Les Gerbes. Revue littéraire bimensuelle. 1905 - 1906.
Le Feu, Marseille, 1905-1906.

La Rose Rouge, 1919. Cendrars, Salmon, Carco.
La Revue Contemporaine, Lille. 1900 - 1902
Le Thyrse. 1897.
La Cité d'Art et L'Art et l'Action. 1898 - 1899.
L'Idée Moderne 1894-1895.

Le Nouvel Echo 1892-1894.
La Poésie Moderne, 1882.

La Pléiade. 1886 et 1889.
La Basoche 1884-1886.
L'Élan littéraire 1885-1886.
L'Effort Libre, 14 numéros, 1911-1914.