jeudi 26 août 2010

L'Arriviste d'Alcanter de Brahm à Félicien Champsaur


L'Arriviste d'Alcanter de Brahm à Félicien Champsaur


Pour le Préfet Maritime.




Dans la Critique, numéro 4 du 20 Avril 1895 on pouvait lire dans la rubrique « La Critique – De Tout » signé Aspic :

« Notre collaborateur Alcanter de Brahm vient, dit-on, de publier une réédition de l'Arriviste, cette étude si curieuse du monde des lettres modernes et des cénacles décadents. Mais pourquoi diantre a-t-il pris pour pseudonyme Marc Stéphane ? »

La Critique semble bien accusé Marc Stéphane de plagiat... il faudrait vérifier, mais les deux volumes semblent être aussi rares l'un que l'autre.

Marc Stéphane. L'Arriviste. Édition d'auteur Paris : impr. de A. Davy, 1895, In-16, 151 p.

Alcanter de Brahm avait fait paraître chez Souque (sous réserve), son Arriviste en 1893.

Félicien Champsaur publie en 1895/96, chez Ollendorff, ses trois volumes du Mandarin (Marquisette. 2 : Claude Barsac. 3 : Renée April).

En 1902, le Mandarin devient L'Arriviste lors de sa publication chez Albin Michel. La colère d'Alcanter de Brahm de s'être fait dépossédé de son titre, et pas seulement par Marc Stéphane et Champsaur, s'exprime alors dans un article du numéro 177, du 5 juillet de la Critique.


L' Arriviste (1)


Ce vocable, dont j'ai quelque fierté, puisque sorti pour la première fois de ma plume, il y a quelques dix ans, et choisi pour titre à mon premier roman, il devait faire si rapidement fortune dans le monde, vient une fois de plus, de stimuler l'esprit de concurrence déloyale dont se rendent coupables les confrères jugés les plus sympathiques à leur attitude dans le monde.

J'ai souvenir, en regrettant bien vivement que le Tribunal de commerce n'enregistre point de brevet d'invention de cette nature. Lesquels garantiraient une propriété, aussi utilement que s'il s'agissait de tampons perpétuels ou de corset rabougris, j'ai souvenir, dis-je, d'un certain nombre de livres et de pièces de théâtre présentés sous ce titre L'Arriviste.

C'est d'abord M. Marc Stéphane, romancier morphinomane, qui en 1895 se figura inaugurer le néologisme en tête d'un ouvrage d'intérêt relatif, et qui fut bien surpris, le jour où il me fut présenté comme mon collaborateur un peu tardif.

Puis M. Michel Provins qui avait choisi ce titre pour une pièce destinée à la Comédie Française, et le modifia probablement, grâce à la vigilance bienveillante de M. Jules Claretie dont les articles du Journal et du Temps ont à plusieurs reprises consacré mon droit à la paternité de cette expression imagée.

Hier encore, M. Ernest d'Hauterive, gendre d'Alexandre Dumas fils, et historien fort documenté, faisait paraître à l'Echo de Paris un feuilleton fort attrayant, et très délicatement, sur ma requête, pluralisait son titre, primitivement dénommé L'Arriviste. Puis Une Arriviste, figurait au programme d'un petit théâtre Montmartrois.

Enfin, voici M. Félicien Champsaur, romancier d'un sensualisme attrayant, que dénature parfois le souci de flatter trop vicieusement l'épiderme de notre race byzantine, et aussi le besoin de réaliser des bénéfices avec des productions aussi hâtives qu'impersonnelles.

M. Félicien Champsaur m'avait été à mainte reprise signalé comme peu scrupuleux dans ses façons de se documenter, très modifiées depuis le temps où il protestait dans l'Evénement contre les dépradations commises au détriment de Dinah Samuel par un de ses confrères du Gil-Blas. Mais le connaissant personnellement, et lui ayant adressé jadis le service de l'Arriviste, j'étais à mille lieus de supposer qu'il gratifierait de ce titre, sans m'en référer pour avis préalable, un rom à scandale, relatif à l'actualité déjà émoussée de l'affaire Humbert, et dont l'analyse serait superflue.

J'ai trop le mépris des formes juridiques au moyen desquelles on prétend se faire rendre justice dans notre pays, en y mettant le prix, pour inquiéter un confrère que je croyais un ami, par telles voies que de droit, sans avoir même la certitude d'un résultat conforme à l'équité la plus élémentaire. Je préfère soumettre le fait à l'opinion par la voie des journaux, en prévenant toutefois M. Félicien Champsaur afin qu'il n'ait pas lieu de s'étonner, le jour ou servant lui-même de personnage principal à l'un de mes futurs romans traitant de la mauvaise foi littéraire, il verra mon livre figurer à l'éventaire des libraires sous ce titre suggestif : Le Mandarin.

Alcanter de Brahm.

(1) Albin Michel




1 commentaire:

zeb a dit…

Le Préfet maritime, nous fait savoir qu'il possède un exemplaire numérique de l'Arriviste de Marc Stéphane qu'il est prêt à échanger contre un exemplaire de l'Arriviste d'Alcanter de Brahm.