vendredi 27 août 2010

Les Paralipomènes de Punch. Emile Straus. Jarry.


Les Paralipomènes de Punch


Dans les n° 194 et 195 des 20 mars et 5 avril 1903 de La Critique, Émile Straus consacre deux articles à la figure de Polichinelle et au théâtre de Marionnettes. Straus y fait l'historique du type de celui qui « se nomme Pulcinella à Napoli, Punch à London, Polichinelle à Paris, Hans Wurst à Berlin, Kasperl à Wien, Jan Klaasen à Amsterdam, et Kara Keuz à Stamboul », sous un titre Jarryque : Les Paralipomènes de Punch.
Arrivé à Paris et à ses théâtres de marionnettes, il consacre au Père Ubu et à Jarry, une partie de son deuxième article, et en profite pour y insérer le dialogue de Martine et Papyrus sur Ubu, déjà publié dans le numéro N° 37, du 5 septembre 1896 de la même Critique. Jarry lui sera reconnaissant dans une lettre d'avoir fait « preuve d'une notable et curieuse perspicacité sur les rapports entre les deux Bretagne : ma grand-mère est une Dorset... » A propos du théâtre des Gueules-de-Bois, Jarry lui écrit : « Je regrette de n'avoir pensé à vous relater ce que furent les Gueules-de-Bois. L'acteur qui incarna le Père Ubu n'eut point l'organe de l'emploi ; mais le général Lascy fut joué (en un rôle allongé et même spécialement construit) par le célèbre Anatole !... » (1)


Si Guignol n'est pas le splendide professeur d'énergie qu'est Punch, du moins le sentons nous plus près de nous. Pourtant cet art minuscule tomberait-il lui aussi en décadence ? Des théâtricules qui s'élevaient au Carré-Marigny ont disparu Gringalet, Bambochinet et Bobino. Il ne reste plus que le célèbre Anatole, Guignolet et Pantagonia, poupées mécaniques. Les pantins reviendraient-il à leur point de départ évolueraient-ils vers le théâtre d'ordre ? Lesage, Voltaire, Fielding, Byron, Goethe ont écrit des comédies à leur usage, Haydn n'a pas composé pour elle moins de cinq partitions. Et les drames de M. Maurice Bouchor, exquis mélange de philosophie, d'antiquité et de religion, et les tragédies de M. Maurice Maeterlinck et surtout la gigantesque éthopopée d'Ubu Roi de M. Alfred Jarry, représentée en 1888 par le théâtre des Phynances, le théâtre de l'Oeuvre (direction Lugné-Poe), le théâtre des Pantins (direction Georges Roussel) et le théâtre des Gueules de Bois !
Ubu se rapproche du Punch anglais et non de notre Polichinelle, en ce sens qu'il est shakespearien. Il porte du reste en épigraphe : « Adonc le Père Ubu hoscha la poire dont fut depuis nommé par les Anglais, Shakespeare et avez de lui sous ce nom maintes belles tragoedies par escript. » Il est en lui du Richard III, du Henry VIII et du Falstaff. N'oublions pas que M. Alfred Jarry est Breton et que le génie de la Petite-Bretagne s'amalgame aisément à celui de la Grande-Bretagne. Donné aux exégètes. De plus Punch et Ubu ont un culte pour la physique. Pour Punch c'est la Déesse à la gueule de bois vert, aux côtes ligneuses, la divine Trique, la fille du pin majestueux qui module sur les lombes ses romances suggestives, affirmation supérieure de soi, suprême de soi, suprême liberté intérieure et extérieure.
Pour le Père Ubu la physique est la nature comparée à l'art, le moins de compréhension opposé au plus de cérébralité, la réalité du consentement universel à l'hallucination de l'intelligent, Don Juan à Platon, la vie à la pensée, le scepticisme à la croyance, la médecine à l'alchimie, l'armée au duel. C'est plus complexe, vous le voyez, issu d'une théorie et d'une conception arbitraire de l'entendement.
Pour ne pas divaguer, je donnerai le verbe à Papyrus et Martine qui dans le petit dialogue suivant tenteront de nous éclaircir la métaphysique ubuesque.


Suit le dialogue déjà publié ici : Ubu Roi par Martine et Papyrus.



(1) Lettre d'Alfred Jarry à Papyrus, mise en vente par la Librairie de l'Abbaye - Pinault - Jacques-Henri Pinault, 27 & 36, rue Bonaparte - 75006 PARIS – http://www.franceantiq.fr/slam/Abbaye-Pinault. Lettre décrite sur le blog Pataplatform

Alfred Jarry dans Livrenblog : Alfred Jarry : Premières publications. Messaline : Jarry - Dumont - Casanova - Champsaur. Alfred Jarry, Lucien Jean, Georges Roussel. Affaire Adelsward (12e partie). Jarry sur l'affaire Adelsward dans Le Canard Sauvage.

Émile Straus dans Livrenblog : Alfred Jarry et Le Théâtre des Pantins. L'Almanach du Père Ubu par Martine. Le Père Ubu dans La Critique. Les Jours et les Nuits d'Alfred Jarry par Émile Straus. Émile Straus, quelques documents. Émile Straus par Alcanter de Brahm. Le Surmâle d'Alfred Jarry par Martine et Papyrus. Encore Emile Straus (bibliographie)




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