dimanche 9 mars 2008

La Maison Philibert au Théâtre. De Lorrain à Fréhel.


Une curiosité en marge de la bibliographie de Jean Lorrain.


Le bal des Vaches
C'est le bal des Vaches, là, où,
Viennent parmis tous les marlous
Toutes les plus bath gonzesses,
Les artiss's et les dussèches.
Pour admirer les barbeaux
Des radeus's du Sébasto,
C'est le bal des Affranchis
Où l'on voit chaque nuit
Radiner l'Tout-Paris,
Rich's et apaches...
Les fauchés et les rupins
Les grand's dam's, les catins :
Y a la lie et l'gratin
Au bal des Vaches !


La Maison Philibert, José de Bérys, Noré Brunel et Georges Normandy, d'après le roman de Jean Lorrain, pièce en quatre actes mêlée de chants, représentée en février 1932 au Moulin de la Chanson. Editions Albin Michel.


Les adaptations théâtrales de romans ne sont pas rares, La Fille Elisa et Les Frères Zemganno de Goncourt, Fromont Jeune et Risler Aîné, L'Arlésienne, Jack, le Nabab, de Daudet, les vingt-sept pièces tirées des œuvres de Zola, Aphrodite de Louÿs mis en musique par Erlanger et adapté par Louis de Gramont, n'en sont que quelques exemples. Avec La Maison Philibert roman publié en 1904, il ne s'agit pas de tabler sur le succès d'un auteur ou d'un roman récent, l'adaptation est de 1932, il s'agit plutôt de l'exploitation d'un héritage abandonné à Georges Normandy et dont celui-ci n'aura cesse de profiter.

Il aura donc fallu trois auteurs pour adapter ce qui reste l'un des grands roman de Jean Lorrain, un roman patchwork, avec ses différents niveaux de langage, sa narration non linéaire, construit comme un puzzle où s'imbriquent comme des pièces indépendantes contes, souvenirs, chroniques, avec des narrateurs différents, qui forment enfin un tableau précieux des moeurs des "classes dangereuses" et de la prostitution au début du siècle.

Une surprise pourtant m'attendait à la lecture de la liste des personnages et acteurs. Le rôle de la Goualeuse qui intervient au troisième acte pour le Bal des Vaches, était tenu par Fréhel, monument de la chanson réaliste, archétype de la chanteuse du pavé de Paris, elle est accompagnée par l'accordéoniste aveugle, René de Buxeuil (auteur de nombreuses chansons). On ne sait pas qu'elle était la teneur de l'intervention de la chanteuse, voici le passage (acte III scène V) où apparait la Goualeuse :

voix diverses
Et alors, on n'chante pas ce soir ? Pére Muron, où c'est-y qu't'as planqué tes artistes ? La goualeuse ! la goualeuse !

Le Père Muron
Voilà ! Voilà ! Vous échauffez pas ! (à la cantonade) Clara, ma fille, on te réclame !
(La chanteuse, vêtue comme une fille, arrive du fond.)

Tous
Bravo ! Vas-y Clara !

(Tour de chant et, à la sortie de la chanteuse, reprise de son premier refrain en chœur.) (Tandis que les couples dansent, accompagnés par l'accordéon, sur le dernier refrain de la chanteuse, entrent Philibert et Myrille.)


José de Bérys (Pseudonyme de José Bloch 1883-1957) Ecrivain, poète, journaliste, auteur de pièces de théâtre (Vaudevilles, comédies, piéces radiophoniques), opérettes, chansons, scénarios et dialogues de films, romans, secrétaire général de théâtre, où il monte des revues. Outre des collaborations régulières avec Noré Brunel, notamment La Loterie des suicidés, il signera des pièces avec Willy ou André de Lordes.

A la mort de Lorrain en 1906, Georges Normandy est institué exécuteur testamentaire et administrateur du legs littéraire de Jean Lorrain. Georges Normandy publiera des inédits de Jean Lorrain, ainsi que la première biographie qui lui sera consacré. Lorrain ne fut pas le seul auteur normand ayant fait l'objet de ses soins, il s'ésintéressera aussi à Maupassant, avec La Fin de Maupassant en 1926 chez Rasmussen et à Flaubert avec les Lettres inédites à Raoul Duval en 1950 chez Albin Michel, il publiera aussi les Lettres de Flaubert à Maupassant. Seul ou avec son compère M.-C. Poinsot il publiera des anthologies de poésie chez Louis-Michaud, Les poètes patriotiques, Les Poètes Libertins, Les Chansonniers Gaillards, Les poètes humoristes, Les Poètes sociaux, etc. Il est l'auteur d'essais et de romans. Attaché au mouvements littéraires régionaux il participera à de nombreuses revues, dirigeant notamment L'Esprit Français, revue généraliste attentive aux manifestations artistiques régionales.

Noré Brunel, dirigera la revue et les éditions du Fleuve à Lyon, il est l'auteur d'un roman, Guignol, et avec Claudius Roux d'une Vie galante à Lyon au bon vieux temps au mêmes éditions. Il collabore à la revue Paris Sex Appeal dans les années 30. Il est l'auteur de romans populaires seul ou en collaboration avec Marcel Thyl ou Pierre Chaine (romans policiers, sportifs, de Capes et d'épées), il signera même deux romans adaptés de scénarios cinématographiques des aventures de Rouletabille inspirées par Gaston Leroux (Rouletabille contre la Dame de Pique et Rouletabille joue et gagne).

Illustrations de Bottini pour l'édition originale de La Maison Philibert, Librairie Universelle 1904


Voir : La Maison Philibert, livre électronique réalisé par les Editions du Boucher, avec une présentation de Mme Noëlle Benhamou, suivi d'un extrait du compte rendu de La Maison Philibert par Rachilde, publié dans Le Mercure de France, n° 177, septembre 1904.

Jean Lorrain : Consul [le singe des Folies-Bergère]. Jean Lorrain n'assassinera personne. Jean Lorrain en 1931 L'Esprit Français enquête. Samain : Mendès. Lorrain. Jeanne Jacquemin. Les Académisables : Jean Lorrain. Donnay se souvient : Verlaine, Schwob, Lorrain, Allais. La Maison Philibert au Théâtre. De Lorrain à Fréhel. Jean Lorrain - Georges Normandy dans La Revue Contemporaine. Jean Lorrain dans le Gil Blas illustré. Jean Lorrain plagiaire de Rimbaud et Laforgue. François de Nion : Sonyeuse. Jean Lorrain par Henry Bataille.


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